Pendant trois jours, Walkzine est parti se rafraîchir les oreilles à l’Hippodrome de Longchamp grâce à un cocktail explosif solidaire et musical.
Solidays, c’est un peu le festival qui annonce le début de l’été, le temps des copains, le temps des amours, avec 80 concerts au programme et des animations en veux-tu en voilà, le tout sous le signe du partage et de l’espoir. Et lors de cette 17ème édition, qui a d’ailleurs battu son record de fréquentation avec 180 000 personnes entre le 26 et le 28 juin, et dont les bénéfices devraient s’élever à plus de 2,6 millions d’euros d’après Luc Barruet – fondateur et directeur de Solidarité Sida – nous avons été chouchoutés.
Plusieurs options ici : courir de concerts en concerts, assouvir ses envies de sensations fortes grâce au saut à l’élastique dont la file d’attente donne d’emblée le tournis, attiser sa curiosité et étancher sa soif d’informations au « Village Solidarité » où sont réunies plus d’une centaine d’associations, passer son temps à la Green Room pour une ambiance clubbing ou encore « chiller » dans les espaces « détente » çà et là. Ou tout faire à la fois. Gros programme.
– JOUR 1 –
Pour une mise en bouche musclée, nous nous dirigeons vers la scène Bagatelle, pour Palma Violets, dans une foule encore clairsemée. Groupe anglais de rock garage, les quatre londoniens ne ménagent pas leurs efforts sous un soleil de plomb et nous assènent de riffs agressifs, de rythmes qui bastonnent et de paroles directes et brutales. Ce qui entraîne même le début d’un petit pogo sur le devant de la scène. Mais il est encore un peu tôt pour s’y joindre.
Izia, que nous retrouvons par la suite sur la grande scène Paris, nous délivre une prestation sulfureuse. La jeune femme de 24 ans possède une énergie incroyable et ponctue son live d’intermède évoquant l’amour, le « safe sex », et une joie non dissimulée d’être de nouveau invitée sur ce festival. De sa voix cassée, elle nous propose les titres de son dernier album, « La vague » plus pop que les précédents, et dont nous retenons surtout le titre Reptile.
Retour à Bagatelle avec le duo australien Angus & Julia Stone. Leur pop folk sucré est une ode à la délicatesse, et c’est avec allégresse que nous entrons dans leurs univers. Entre leur tube Big Jet Plane, repris en cœur par un public connaisseur et leur dernier opus Grizzly Bear, chanson parfaite pour nos prochaines vacances, c’est un beau moment que nous passons là. Et ce n’est pas le groupe de jeunes filles à couronnes de fleurs à côté de nous qui nous dira le contraire, vu leurs mines réjouies.
Nous avons alors un choix cornélien à faire entre Asaf Avidan ou Hanni El Khatib. Ce ne fut pas simple, mais nous avons tranché pour Asaf. Cette voix, il est certain, a déjà fait couler beaucoup d’encre, mais on a vraiment l’impression qu’elle pénètre dans les tréfonds de notre âme. Avec une sensibilité qui se ressent à des kilomètres à la ronde, des chansons à fleur de peau, une palette d’émotions exponentielle, passant de la douceur folk, au blues mélancolique, jusqu’à l’agressivité du rock, Asaf nous a délivré un show digne de ce nom. Clameur globale sur One Day, et cette partie magnifique en acoustique. Le public est aux anges.
Petite pause cerises et bières, il est minuit, Cendrillon est rentrée chez elle et nous, on commence la partie nuit. Un tour à la Green Room avec Ivan Smagghe, qui nous délecte d’une house joyeuse et revigorante, parfaite pour aller voir le mastodonte berlinois Paul Kalkbrenner, qui clôture pour ce jour la scène Paris. C’est clairement ici un club à ciel ouvert, et Paulo fait très bien son job, nous faire danser et voyager intérieurement, avec des sonorités chaudes, fortes et profondes.
On file avant la fin pour voir Madeon, jeune nantais de 20 ans (!), ayant déjà collaboré avec Muse ou Lady Gaga, à la fois DJ et producteur. La foule est tellement compacte qu’il sera difficile de s’approcher mais on peut distinguer de loin son amour des ambiances colorées et surtout entendre son fort penchant pour la pop musique, ce qui avouons-le, est parfait pour l’endroit et l’heure. Un petit mix entre Daft punk et Madonna, c’est osé, mais ça marche. Il fait 40 degrés sousrle chapiteau, on est collé à notre voisin, on n’a plus de genoux à force de sauter dans tous les sens ET pour ça, on lui attribue la palme du live de ce jour 1.
On finira ce vendredi sous ce même Dôme en continuant à se déhancher avec Joachim Pastor, qui arrive humblement avec un petit salut de la main. Une jolie découverte à 4h du mat’, ça ne se refuse pas. Et un chouette featuring quand il s’empare d’une guitare électrique et que Disiz, qui débarque donc de nulle part, se lance dans une impro d’Auto-Dance.
Chouchoutés, on vous l’avait bien dit.
– JOUR 2 –
Arrivés en fin d’après-midi, nous croisons de nouveau le groupe de filles à couronnes de fleurs du concert d’Angus & Julia Stone. On décide alors de les suivre pour avoir une journée type de la festivalière Solidays et de recueillir un point de vue différent. Voici donc celui de Charlotte.
Je ne suis pas particulièrement une grande fan de Yael Naïm, mais j’avoue que j’avais hâte de la découvrir en live. Voix posée, nette, on passe des aigüs aux graves en une demie seconde, on dirait que le piano est un prolongement de ses doigts, rien à dire, c’est propre! Un peu trop peut être? Enfin ça c’est ce que je pensais avant d’entendre Toxic, sa reprise de Britney, toujours aussi électrisante! Elle finit avec New soul, tout le monde dodeline de la tête et chante en coeur “lalala la lala lalala la lala”, on s’attendrait presque à voir un lâcher de ballons tout roses, on repart avec le sourire.
En quête de découverte, nous voilà parties au Domino pour Chill Bump : une des surprises de ce festival pour moi ! Pourtant c’était mal engagé : un duo de français (de Tours) qui fait du hip hop en anglais ! Mais BIM, une petite claque dans mes préjugés : ils ont assuré ! Miscellanous rappe dans un anglais impeccable pendant que Bankal s’éclate aux machines. Ils donnent tout sur scène, le public est hyper réceptif, c’est du pur Bonheur !
Changement de décor au Dôme pour Brigitte : elles sont de tous les festivals, mais elles font toujours le job. C’est drôle, je n’ai pas de chanson d’elles dans mon ipod, ni l’intention d’en télécharger, en revanche, c’est toujours aussi plaisant de les voir, de les entendre et de se faire happer par leur univers musical, de se laisser porter par l’harmonie de leurs deux voix, qui fonctionne parfaitement.
Direction le César Circus pour Grand blanc : jamais entendu leurs titres mais j’étais très motivée pour les voir, tant leur présentation sur le programme était élogieuse. A priori, c’est un mélange de Joy Division et de The Cure avec une touche de Bashung, rien que ça ! Peut-être avais-je mis trop d’espoir dans ce concert mais visiblement je suis passée à côté. Oui, il y a des sonorités digitales, beaucoup de claviers qui rappellent les années 80 mais comparer leurs textes à la poésie de Bashung, faut peut-être pas exagérer. Mais bon, je n’abandonne pas, je réécouterai ce quatuor frenchy !
Rone vs IAM : Le dilemme de la soirée ! Après une réflexion très poussée, nous avions décidé de faire les 15 premières minutes de RONE puis de foncer vers la scène Paris pour voir IAM, partant du principe qu’ils joueraient leurs vieux titres à la fin.
Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en 15 petites minutes, RONE a envoyé du lourd. Habité, concentré, il arrive sur scène et enchaine direct les sons. Dès la 3ème chanson, il balance Bye Bye Macadam, on est au top…Le pas décidé mais le cœur lourd, nous quittons le chapiteau pour aller voir les marseillais.
Je ne suis pas une inconditionnelle d’IAM, ma connaissance de leur discographie pourrait presque se limiter à L’Ecole du Micro d’Argent… Pourtant, j’avais hâte de voir ces monuments du rap français ! Quel plaisir de voir Akhenaton, Shurik’N et les autres sur scène ! Ils enchainent les titres que je ne connais pas mais qui semblent être des classiques et en me concentrant sur leurs mots, je réalise que ces paroles sur le mal-être des jeunes, les dérives d’une société à 2 vitesses, pourtant écrites il y a 20, 15 ou 10 ans sont plus que jamais d’actualité. Pour les 20 dernières minutes, ils sortent la totale : boule à facettes, battle de danse (jeu de jambes de Shurik’n incroyable!) et tout le monde danse le MIA ! Ils enchainent avec l’empire du côté Obscur, sabres lazer à la main, et enfin, last but not least, Petit Frère.
Caribou : Déjà vus au Primavera Soud Festival il y a un mois, et le résultat est le même : une première moitié de concert un peu molle. Les gens se réveillent un peu avec Can’t do without you (entêtant), et heureusement la fin du concert va Crescendo ! Petit plus : je trouve ça très sympa de voir un groupe électro qui joue “pour de vrai” des instruments, et qui ne se contente pas d’être derrière une machine ou une platine.
Après 40 minutes d’attente à la Greenroom pour prendre un verre au bar, on zappe Zimmer (electro/house un peu trop violente pour moi) et on traverse la pelouse pour aller vers le Domino assister au Novamix. C’est parfait pour terminer la journée, une battle de DJ set entre le Mellotron et Mawimbi : ça saute, ça danse, ça vibre… Et ça annonce aussi l’heure d’aller se coucher. Ce sera donc sur ces derniers mots que nous laissons Charlotte et ses amies repartir. Merci pour cette journée les filles !
– JOUR 3 –
Hyphen Hyphen nous accueille pour ce dernier jour. Découvert il y a quelques années avec le titre Atlas, les quatre niçois ont une place particulière dans notre cœur depuis. Soignant à la fois l’esthétique avec des maquillages géométriques, et la mise en scène, leur pop électro teintée de rock est un véritable appel à la danse. La charismatique chanteuse Santa, de sa voix puissante à la limite de la cassure, est dans un don total d’elle-même et n’hésite pas à sauter dans la foule et se faire porter tout en continuant à assurer sans la moindre difficulté technique…Chapeau bas pour la performance. Futur hit, Just need your love, sera le peak time de cette toute petite heure.
Le festival se met alors sur pause pour le Patchwork des noms, une cérémonie contre l’oubli. Face à la grande scène, le moment est au recueillement et l’émotion est palpable lorsque les noms de ceux qui nous ont quittés sont énoncés les uns après les autres. Histoire de ne pas oublier que derrière ce festival et ces moments musicaux, nous sommes aussi là pour ne pas baisser les bras face à la maladie.
Après ce moment symboliquement fort, c’est l’heure de la pétillante Yelle. De la fraîcheur, de la spontanéité, un univers coloré et décalé, on le dit sans sourciller, concert au top. Arrivée avec une robe bleue électrique magique, un logo lumineux Yelle en fond de scène (le signe peace and love à l’envers), deux batteurs sexys (dont Grand Marnier), on assiste à une succession de tableaux pailletés et acides. Entre le féministe Je veux te voir, l’éducatif Bassin (vive le déhanché arrière des deux boys), ou le faussement naïf Que veux-tu, l’artiste bretonne nous a séduits et amusés.
Changement de lieu et d’ambiance avec Benjamin Booker. Ce sera le moment punk blues et une belle découverte de notre côté. L’américain, qui nous vient de la Nouvelle-Orléans, a pourtant un titre déjà bien connu Violent Shiver, à en juger par la petite foule du César Circus qui chante et sautille de gauche à droite. Entre les White Stripes et Alabama Shakes, impossible de ne pas accrocher à cette voix éraillée et chaude, doublée d’une guitare et d’une batterie bien, bien énervée. A suivre.
En parlant d’énervement, c’est l’heure de Brodinski. A en juger par le programme, Brodinski présente Brava, son dernier album en date, musique hybride entre du hip-hop et de la techno. Pour la subtilité on repassera. Ce sont là de bonnes grosses basses et des paroles un brin « vénères ». C’est une gifle brutale au visage, on est dimanche, il est 20h15, il faut gérer. Mais tout le monde semble aimer se faire violenter. On croise même des petits hommes verts, et jaunes. Si, si ! Des participants de la color party de 20H. Nous, on décide de s’esquiver avant la fin et d’ attendre sagement Fakear.
Dernier concert pour ces Solidays 2015, le jeune Caennais, avec des sonorités douces, mélodieuses et teintées d’influences asiatiques, nous fait entrer à l’intérieur de la forêt rose et lumineuse de la pochette de son second EP « Sauvage ». Accompagné d’une ribambelle de musiciens et d’un joli sampleur aux touches multicolores qu’il manie avec classe et dextérité, ses morceaux se succèdent et ne se ressemblent pas sous ce beau soleil couchant et ce petit vent chaud. Le planant Neptune nous laisse une impression de douce rêverie et nous repartons vers la navette dans une euphorie tendre et partagée.
Comme chaque année, il a fallu géré le « soliblues » une fois le festival achevé… Merci encore à Solidays pour ce week-end merveilleux.
Rédaction : Anne-Lise Chrobot & Charlotte
Copyright Photos : Amélie Laurin & Marylène Eytier