Retour sur Rock en Seine – Edition 2014

RockEnSeine2014
RES-©Sylvère Hieulle

Le Festival Rock en Seine, organisé au Domaine national de Saint-Cloud (Hauts-de-Seine) les 22, 23 et 24 août – complet les 3 jours – a rassemblé le plus grand nombre de spectateurs de son histoire. Shorts en jeans et t-shirts au-dessus du nombril, 120 000 festivaliers dont 2500 campeurs sont venus chercher l’été auprès des têtes d’affiches internationales, comme des découvertes et groupes indés. Les artistes se partageaient les cinq scènes sur trois jours, pour secouer la capitale, malgré un climat de novembre. De quoi faire passer les soucoupes volantes du décor, échouées dans le Parc parmi autres drôleries de l’Espace, pour une normalité.

JOUR 1

GARY CLARK JR. – Blues/rocker des temps modernes, Gary Clark Jr. baptise la Grande Scène de cette 12ème édition du Festival. Inévitablement affilié à Hendrix, le Texan aux guitares maîtrisées nous embarque dans un savoureux mélange de blues, teinté de soul, de pop et de hip-hop. Solos interminables mais interstellaires desquels on ne rouvre les yeux que perplexe de ne pas se retrouver dans un décor américain usé, comme on se l’était imaginé.

…Pendant ce temps-là… CAMP CLAUDE – La finaliste du Festival « Sosh aime les Inrocks Lab », déjà découverte lors de ce même festival fin mai dernier, s’offre le stand Ile-de-France sous une tente remplie bien au-delà de sa capacité. Du côté de la scène Pression Live, découverte des jeunes Anglais de Traams. Péchus, bien que légèrement linéaires.

JAKE BUGG – On repart sur la Grande Scène, où l’on retrouve celui que l’on pourrait imaginer être le petit-fils spirituel de Bob Dylan et de Noel Gallagher, associés. Il n’est d’ailleurs pas surprenant d’apprendre que le membre d’Oasis a poussé ce British originaire de Nottingham, à faire ses premières armes sur scène. Col roulé noir et coupe au bol, le jeune homme – qui semble pourtant encore peu connu du grand public français – déchaîne les passions dans la foule qui reprend ses chansons sous d’épais nuages noirs…

Extrait Live

BLONDIE – Le crachin s’installe et semble décidé à camper, lui aussi. C’est donc en courant que l’on rejoint la Scène de la Cascade où l’on s’abrite où l’on peut, afin d’accueillir Blondie, phénomène des 70’s. Debbie Harry – qui nous confie avoir « perdu quelques neurones » depuis son dernier passage à Paris – et son groupe, enchaînent les hits repris par les spectateurs, dont un bon nombre n’était même pas nés en leur temps de gloire… et le public semble davantage se souvenir des paroles du légendaire Call Me, que Debbie Harry elle-même !

DIE ANTWOORD – Vous a t-on mentionné les vaisseaux spatiaux et autres drôleries de l’Espace échoués sur le domaine du Festival ? Ne cherchez plus… nous avons trouvé les coupables. Formé en 2007 au Cap (Afrique du Sud), ce duo vous fascine, vous dégoûte, ou vous subjugue, mais ne laisse personne indifférent. Les deux voix – celle grondante, agressive de Ninja (Watkin Tudor Jones), et celle enfantine, presqu’innocente de Yo-Landi Vi$$er (Anri du Toit) – déchaînent une avalanche rap hip-hop electro-trash en anglais, afrikaans et xhosa, langue d’Afrique australe, sur fond de projections vidéos hors du commun, inquiétantes et dérangeantes (personnages aux visages déformés et angoissants, chairs et sang, lutins de bande-dessinée ornés de phallus…).

Die Antwoord
Die Antwoord-©Nicolas Joubard

THE HIVES – Formé en 1993, le groupe garage punk suédois à l’humour très particulier n’aura pas créé la surprise vendredi soir en foulant la Grande Scène dans leurs complets – comme à leur habitude – noirs et blancs. Prestations scéniques rappelant volontairement la scène des 60’s, le groupe n’a pas perdu de sa spontanéité. « Nous sommes le groupe de la musique rock magnifique suédoise », affirme Pelle Almqvist et le public semble approuver.

Extrait Live

ARCTIC MONKEYS – Actuellement en tournée estivale dans la plupart des plus importants festivals aux Etats-Unis et en Europe, c’est leur cinquième album, AM, que le groupe formé en 2002 dans la banlieue de Sheffield est venu nous présenter. Ce dernier opus publié il y a tout juste un an regorge de tubes qu’Alex Turner, chanteur et guitariste, mène avec conviction. Scène sobre, seule une forme d’onde visuelle en néon fait office de décor. De nombreux fans arborant fièrement les couleurs du groupe se déchaînent au son puissant et calibré des chansons, malheureusement peut-être un peu trop rôdées… L’évolution depuis leur album précédent Suck It and See en 2011 est aussi visible qu’audible. Seul petit bémol donc pour un si beau rock, qui serait sans doute encore plus beau s’il se ressentait légèrement moins réglé comme du papier à musique. Première journée Rock en Seine achevée… On est fatigués, mouillés, souillés mais on n’en a jamais assez.

Extrait Live 

JOUR 2

ALB – C’est sous une après-midi ensoleillée, qui colle parfaitement à la musique festive et joyeuse d’ALB que nous arrivons pour ce deuxième jour. L’artiste, originaire de Reims, partage son studio avec Yuksek, et possède autre chose en commun avec lui : l’art de construire des mélodies pop et légères. En témoigne « Golden Chains » et sa musique 8-bit, influence « Mario Bros », qu’il enchaîne justement sur le générique du célèbre plombier en salopette rouge. Et on en redemande, grands enfants que nous sommes.

Extrait Live

CHEVEU – Le groupe Cheveu est quant à lui déchaîné. Le chanteur, fortement marqué par le festival de Dour, se jette sur nous, monte sur sa table, adopte un accent belge et prend le « Parisien » de haut. C’est un joyeux bordel, nous n’avons pas la moindre idée de ce qu’il raconte, mais qu’importe. Des objets non identifiés volent, des slams à gauche, des pogos devant, des cris dignes de la petite fille/créature maléfique de l’exorciste, un bateau gonflage soulevé par la foule tel le Saint-Graal, nous sommes au cœur du vortex. Bravo pour le titre « Polonia », son chœur digne d’une grande secte et son ambiance fin de soirée qui tourne mal. C’était un concert à ne pas manquer…Quelques acouphènes dans les oreilles plus tard, un besoin de douceur nous envahit.

Cheveu-© Sylvère Hieulle
Cheveu-© Sylvère Hieulle

EMILIE SIMON – Changement complet avec la douce Emilie Simon, accompagnée d’une quarantaine de musiciens de l’Orchestre National d’Ile-de-France. Telle une nymphe dans sa robe tutu froufroutante, elle nous emmène dans un univers féérique qui colle parfaitement à sa douce voix et nous livre une version délicate de son dernier album. Sa déclaration d’amour pour notre capitale « Paris, j’ai pris perpète », est une douceur exquise avec un accompagnement de choix et c’est sur le punchy « Menteur » que nous décidons de la quitter pour Portishead.

Extrait Live 

PORTISHEAD – Hypnotique, prenant et magnifique sont trois termes qui résument exactement le live du groupe britannique. La chanteuse, avec sa parka verte et son jean à la cool, nous déchire les entrailles avec sa voix si pénétrante sur des instrumentations lourdes. Cette scène immense, le groupe en a fait une bulle mélancolique où chacun de nous s’est retrouvé face à ses interrogations profondes sans échappatoires possibles. Images fortes, basses qui nous pénètrent jusqu’à l’os, impossible de ressortir de là indemnes, avec des titres comme « Glory Box », « Sour Time », ou « The Rip », agrémenté de son clip sur grand écran durant lequel nos yeux restent scotchés et notre esprit happé. D’une intensité rare.

Extrait Live

FRANCOIS AND THE ATLAS MOUNTAIN – Après ce moment émotionnellement fort, c’est avec grand plaisir que nous retrouvons François and the Atlas Mountain. Avec en fond de scène la couverture de leur dernière album « Piano Ombre », François et ses compères nous apportent exactement ce qu’il faut : une douce voix et des textes romantiques, des instrus légères et dansantes, des sauts de cabris synchronisés, des pas de danse du plus bel effet sur « La vérité », un déhanché assumé, et une bonne humeur communicative.

THE PRODIGY – Pour conclure sur ce mode festif, rien de mieux que The Prodigy. Autour de nous, certains sont même au pas de course pour ne pas louper le début des festivités. En passant à côté du live de Flume, on entend distinctement le tubesque « You & me » de Disclosure. Côté The Prodigy, on peut dire que les mecs ne sont pas là pour rigoler, surtout qu’ils commencent direct par « Breathe » et qu’on est alors balancé de tous les côtés. Le chanteur est très énervé, égal à lui-même malgré les années qui ont passées depuis cet album mythique « The Fat of The Land » : album que vous avez forcément écouté dans votre adolescence si vous êtes nés dans les années 80 ! On enchaîne sur les gros titres, « Voodo people », « Invaders must die », continuons sur les bonnes choses hein ! Tout le monde, mais vraiment TOUT LE MONDE, est dans un lâchage complet. La jeune femme à côté de nous titube tellement que nous pensons la perdre à un moment, mais non, elle tient. Un micro bémol sur « Firestarter », où on n’entendait pas assez les basses à notre goût. Clôture top sur « Smack my bitch up » repris dans un élan généreux par nous, public. Les gens se poussent, se sautent dessus, se marchent sur les pieds, mais avec le sourire le plus grand au monde… Le pouvoir de la musique ! Les commentaires autour de nous sont positifs, et on en espère autant pour demain.

The Prodigy-© Nicolas Joubard
The Prodigy-© Nicolas Joubard

JOUR 3

C’est l’esprit et le cœur léger que nous nous apprêtons à voir Petit Fantôme en cette journée dominicale. En arrivant, nous jetons un rapide coup d’œil à droite pour apercevoir le chanteur d’Airbourne sur les épaules d’un molosse se faire balader dans la foule sous des cris surexcités.

PETIT FANTOME – Arrivés sur la scène de l’Industrie, on retrouve presque tous les membres de François and The Atlas Mountain. Normal puisqu’il s’agit du projet solo de Pierre Loustaunau, qui accompagne François sur scène. Nous apprécions alors la version live de « Stave », la mixtape téléchargeable gratuitement sur le site de Petit Fantôme, agrémentée pour l’occasion de quelques passages de cuivres. En plus de nous plonger dans une bulle de quiétude, c’est la cohésion entre tous les morceaux qui est frappante. Petit Fantôme, tel un conteur des temps modernes, nous avoue qu’il est un « homme sans courage » avec une sincérité désarmante et continue pendant une heure à nous entraîner dans des histoires douces amères. Impossible de ne pas être touché. Le public est encore timide, mais semble plutôt convaincu. Nous, on en redemande.

WARPAINT – Ce groupe de L.A. à orientation rock/post punk, a mis un peu plus de temps à nous convaincre. La partie instrumentale est très bonne, la partie chantée un peu moins, le groupe a du mal à démarrer, à trouver sa place sur scène. Ovation cependant sur « Love is to die », qui nous fait sortir de notre léthargie. Il serait opportun de revoir ce groupe dans un cadre plus intimiste pour profiter pleinement de son potentiel.

Extrait Live

SELAH SUE – La chanteuse et ses musiciens nous attendent sur la grande Scène. Cette jeune demoiselle belge et sa voix à la « Lauryn Hill » nous a agréablement surpris. Belle énergie et maîtrise de l’espace scénique, nous avons vécu de jolis moments, notamment sur ses titres où seule et en guitare/voix, elle arrive à capter l’attention de l’auditoire… Chapeau bas.

Selah Sue © Sylvère Hieulle
Selah Sue © Sylvère Hieulle

LANA DEL REY – Nous décidons de rester sur place pour attendre la sensuelle Lana Del Rey. C’est sous des applaudissements de feu qu’elle arrive, dans une robe vintage rose, avec une manucure d’enfer et un brushing impeccable sur ses longs cheveux dans le vent, qu’elle ne cessera de balancer de gauche à droite. Lana est donc une belle femme et elle sait très bien en jouer via une attitude de pin-up, ne pouvant s’empêcher de fumer sur scène et de boire à la paille une boisson mystère (un smoothie whisky ?) Quelques doutes nous assaillent concernant sa voix (play-back ou pas play-back) mais passons. Nous passons un moment agréable, avec ses titres phares : « Born to Die », « West Coast », « Blue Jeans » « Young and Beautiful » pour ne citer que ceux-là. Un écran géant avec la diffusion de certains de ses clips ajoute une touche rétro à son show. Ce show, et nous insistons sur le terme, est donc charmant, enjôleur, et très joli. Malheureusement, telle une grande ligne droite discontinue, cela s’avère lassant, voire fatal pour qui n’était pas fan de Lana et de son personnage un poil marketé. Et c’est en bonne femme de communication qu’elle passe les dix dernières minutes à aller voir les personnes du premier rang pour faire le trio gagnant bisous/photos/autographes pendant que ses musiciens continuent de jouer. Qui a dit « Diva » ?

CUT COPY – C’est alors en connaissance de cause que nous décidons de clôturer ce festival par Cut Copy et pas par Queens Of the Stone Age. Aucun regret sur ce choix, tant les Australiens ont fait un final parfait à notre goût : ambiance électro disco, mélange entre synthpop et new wave, scénographie avec des jeux d’ombres et lumière colorée du plus bel effet, farandole au milieu de la foule, ça sent l’amour et la chaleur humaine à des kilomètres à la ronde. De quoi nous faire quitter le festival avec une banane d’enfer et assez d’énergie positive pour la suite. « Free your mind » titre éponyme de leur dernier album est définitivement un conseil qu’on aurait tort de ne pas suivre.

Emission Monte le Son Spéciale « Rock en Seine » 

 Rock en Seine

Rédactrices : Lilith (vendredi) & Anne-Lise (samedi et dimanche)

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