Idriss El Mehdi, Interview

Idriss El Mehdi 1

————————————————CONCOURS———————————— (edit du 25 mai 2014)

A l’occasion de son concert au Petit Bain (Paris) le 5 juin prochain, Walkzine vous fait gagner des places pour découvrir ou redécouvrir le son du guembri d’Idriss El Mehdi, ainsi que l’australien Blake Noble qui joue de la « percussive-guitar » mêlée à des riffs de didgeridoo et le guitariste GAëT

Pour cela, il vous suffit d’envoyer un email à walkzine@gmail.com en précisant votre nom et votre adresse email  (Objet du mail : Idriss)

Tirage au sort le 3 juin 2014.

http://www.petitbain.org/IDRISS-EL-MEHDI-BLAKE-NOBLE

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Lorsque l’on m’a présenté le travail d’Idriss El Mehdi, ma curiosité a tout de suite été attirée par un instrument que je ne connaissais pas. Le Guembri, instrument traditionnel joué par les  Gnawas. Ajouté à cela qu’il le mêle à une musique plutôt pop/rock… Il n’en fallait pas plus pour que je veuille en savoir plus sur le parcours et l’univers artistique métissé de ce charmant franco-marocain. C’est donc au cours d’une session acoustique live avec ses musiciens, au Studio Soult, que je suis allée à sa rencontre en mars dernier. La sortie de son album Wild Bird en ce 22 avril, était enfin l’occasion de vous le présenter.

Idriss, tu as grandi entouré de musiques classique orientale et occidentale, de jazz, de rock… Quelles ont été les  grandes lignes de ton parcours musical ?

La plus grande ligne ça a été le jazz. J’ai commencé très tôt à jouer du jazz, dès l’âge de 11 ans. Quand j’ai commencé à faire du piano j’étais déjà passionné de jazz et je ne voulais faire que ça. Ma prof. de l’époque était une vieille dame de 75 ans et elle voulait me faire faire du classique, mais j’ai pas persévéré… Au bout de 4 ans de piano avec elle, elle m’a dit qu’elle n’avait plus rien à m’apprendre… Je commençais à relever (retranscrire) du Bill Evans et des choses comme cela. J’ai continué à Casablanca, de 14 à 18 ans, à apprendre le jazz tout seul tout en jouant dans des groupes casablancais. Ensuite, je suis venu à Paris, à l’âge de 18 ans pour faire des études de musique. Je me suis vraiment frotté au jazz parisien, je me suis fait des copains de mon âge qui étaient tout autant fous de jazz et j’ai évolué comme cela pendant 10 ans…

Tu as donc suivi l’enseignement du jazz dans des écoles américaines à Paris ?

Je suis venu du Maroc pour étudier la musique. La première année, j’ai fait une école française puis je me suis inscrit dans une école de commerce parce que mes parents voulaient que je fasse des « études  sérieuses »… mais je me demandais ce que je faisais en cours de commerce international, alors un beau matin de printemps, j’ai fermé mes cahiers et j’ai intégré l’American School pour faire des « études sérieuses » de musique !

Idriss El Mehdi 2

Comment s’est passée la transition entre la fin de ton cursus et le moment où tu as décidé d’intégrer le Guembri dans ta musique ?

Sur un parcours de 20 ans à Paris, je n’ai pas fait que du jazz. On m’a appelé pour travailler avec plusieurs artistes. Je faisais un peu de tout et j’ai découvert le Guembri en 1999 en allant à Marrakech.

J’étais en voyage avec un copain et il m’a dit « Viens on va dans une soirée privée, chez un ami ». On est arrivé et j’ai entendu des tambours. Tout le monde dans la fête savait qui était en train d’arriver. Et là, j’ai vu des musiciens gnaoua et le grand Maître Mahmoud Guinéa… Ce jour là, j’ai pris une énorme claque en les voyant jouer. Ils se sont assis et se sont mis à jouer pendant 2 heures, des chants traditionnels. A la fin, je suis allé voir un des musiciens – j’osais pas m’approcher du grand maître – je me suis présenté en tant que musicien de jazz marocain, et il m’a dit en arabe « Si tu passes par Essaouira, viens nous voir, tu seras le bienvenu ».  Le soir même, j’ai dit à mon pote qu’il s’était passé quelque chose, qu’il fallait absolument que je parte à Essaouira… Le lendemain, on a pris la voiture. Il faut savoir que Mahmoud Guinéa est le plus grand Mâallem d’Essaouira et le sanctuaire gnaoua d’Essaouira, zaouïa sidna bilal, est occupé par sa famille. On est arrivé le soir, on a tapé à la porte de la zaouïa mais ils refusaient tout le monde. J’ai vu au loin le beau-frère du Maître qui nous a fait rentrer et j’ai pu rencontrer le Maître.

Quelques mois après, je faisais un concert avec mon quintet de jazz à Ouarzazate pour le Marathon des sables. J’ai proposé au programmateur de faire venir le Mahmoud Guinéa pour que l’on joue ensemble, avec mon groupe. Je suis ensuite resté un long moment à Essaouira et  j’ai passé du temps avec le Maître et ses musiciens. Avec mon break Nevada 21, je les conduisais à leurs « lilat » – soirées traditionnelles – et je les regardais jouer. Puis, je suis parti du Maroc avec un Guembri… et j’ai commencé à en jouer.

guembri

Tu avais appris le Guembri avec eux ?

Non. Ils me montraient, je regardais. Ils me montraient deux, trois notions mais c’était pas des cours. Je suis rentré à Paris avec des cassettes de Mahmoud, et j’ai appris comme ça, tout seul.

 Comment passe t-on du piano au Guembri ?

Quand je me suis mis au Guembri, c’était vraiment un coup de cœur. C’est mystique, j’ai été happé. On dit souvent au Maroc que « tu es appelé ».  Mon père flippait quand j’ai commencé à fréquenter les Gnaouas car ils n’avaient pas la même réputation qu’aujourd’hui. C’était considéré comme du vaudou, chez nous au Maroc et il avait peur de la magie noire…

J’ai commencé à apprendre seul chez moi ce qu’on m’avait montré. Il était temps pour moi de découvrir un nouvel instrument… J’ai été obligé d’apprendre des airs traditionnels à l’oreille. Après il a fallu que j’apprenne les mots phonétiquement. Puis j’ai assemblé les briques, j’ai rapidement commencé à composer… et très vite, je me suis fait mon propre jeu qui n’est pas vraiment gnaoui.

Parle-nous de ta rencontre avec Tony Allen.

Quand j’ai commencé à jouer du Guembri, c’était une époque où j’écoutais beaucoup Fela Kuti et une de mes projections était de jouer un jour du Guembri avec Tony Allen. J’étais convaincu que mes grooves et les siens se marieraient très bien. 

Il y a 2 ans, après avoir entendu les pré-prods de l’album et persuadé que cela allait lui parler, un ami me l’a présenté. On s’est rencontrés chez lui et je lui ai passé No Problem. Il m’a demandé qui jouait de la batterie, je lui ai dis «  mon batteur »,  il m’a répondu cash « I wanna play on this song ! ». On a passé la soirée ensemble, jusqu’à 4h du mat’ à discuter et à boire du whisky. Deux semaines après, je bookais une séance de studio et il est venu en featuring sur No problem

Quelques mois plus tard, on était sur scène au Duc des lombards avec d’autres éminents musiciens. Et comme il le dit sur une des vidéos, c’est la première fois qu’il jouait sur scène, accompagné d’un Guembri… Pour moi ça restera un souvenir mémorable et un grand moment dans mon parcours. En résumé, c’est un vieux rêve qui s’est réalisé ! 

Dans quel contexte ton album « Wild Bird » a t’il été composé ?

Cet album est arrivé lors d’une transition… Avant je chantais en français, et je me suis rendu compte qu’il y avait une dichotomie en France, entre la perception de l’instrument et le fait de chanter en français. Je me suis donc éloigné de la chanson française et j’ai commencé à composer en anglais. Ça a été une transition sur deux ou trois ans, parce que je faisais des concerts où je chantais encore en français… Jusqu’au jour où j’ai décidé que j’allais me consacrer à l’anglais.

Et de quoi parle cet album ?

La plupart des textes sont engagés. Je n’ai pour l’instant aucune chanson d’amour sur mon album, pas de chansons légères non plus. Tout est parti de cette chanson qui s’appelle No problem. J’étais allé voir un auteur qui s’appelle Pierre Grillet et à qui j’avais demandé un texte en anglais. Certains pourraient reprocher qu’il est trop simple, moi au contraire, je l’ai trouvé très « africain ». Il y a peu de mots, c’est un message assez direct et il m’a fait penser à une composition qui datait de 6 ans, qui dormait dans mon minidisc. C’était le départ de l’album…

A partir de là, j’ai commencé à composer d’autres chansons dont notamment « Wild Bird » et « One O One »… J’étais à la recherche de textes et je suis tombé sur les textes de ma sœur, sur MySpace. Elle est au Maroc et je ne savais pas qu’elle écrivait… J’ai trouvé ça beau ! Je suis donc content car dans l’album, il y a deux textes de ma sœur, « Wild Bird » étant une de ses histoires un peu personnelles que j’ai adaptée et mise en musique.

Il y a mon fils également qui apparaît sur l’album, car il était en studio avec nous lorsque j’enregistrais les voix. Il avait un an et demi, il touchait à tout et des fois, il s’amusait avec le micro. Il y a une chanson qui s’appelle « Goddamn the pusher man » c’est celui qui pousse à la consommation, en général c’est le « dealer ». Le rapport avec mon fils, c’est que je pars du principe que je suis adulte, donc je peux consommer si je le veux. Mais les dealers qui poussent les gamins à la consommation, je suis totalement contre ça… En guise de clin d’œil donc, j’ai composé l’intro au piano et intégré la voix de mon fils.

Idriss El Mehdi 3

Quelles sont les prochaines étapes de ce projet ?

Publication initiale le 21 avril 2013

C’est un projet que j’ai monté en autoproduction totale. Par la force des choses, j’ai fini par créer un label, en me disant que si je ne le faisais pas, personne ne le ferait pour moi. J’ai donc cette double casquette et j’apprends à faire le métier de producteur. J’ai la chance d’avoir une équipe soudée… Astrid Moors, Mounir Kabbaj, Yassin Tabouktirt me soutiennent et travaillent à mes côtés, car ils aiment ce projet. Je suis d’ailleurs assez ému de cela.

De nos jours, on attend des artistes qu’ils se démerdent, qu’ils aillent au charbon et c’est intéressant de le faire, on apprend vraiment tous les rouages du métier.

A l’heure actuelle, on est dans cette phase où on organise un concert le 9 mai au Studio de l’Ermitage. L’album sort fin avril… Et je pense déjà au prochain !

Copyright Photos (studio) : Akram « Meloman » BELAID

 http://www.idrisselmehdi.com/ 

Studio de l’Ermitage : Réservations

 

 

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